Cyclic Law
https://www.cycliclaw.com/music/empusae-onasander-umbrosyne-cd-/-dl-246th-cycle
Il paraît d’abord difficile, dans le regard porté sur cet enregistrement, de séparer les apports des musiciens, tant la symbiose semble parfaite et surtout tant le fluide d’Empusae infuse. S’il faut les séparer, la musique d’Onasander navigue volontiers sur les océans dark ambient. Quant à l’univers ambiant, cinématographique, postindustriel qui est familier à Nicolas Van Meirhaeghe / Empusae, il est plus escarpé, plus riche sans doute car il varie les terrains et les altitudes.
Cette œuvre publiée par le label canadien Cyclic Law dont le domaine habituel est largement dark ambient, ne déroge pas à sa ligne éditoriale. Peut-être d’ailleurs marque-t-elle encore davantage ce trait en ce qui concerne Empusae.
L’album Umbrosyne se déroule en trame car ce sont des motifs bien différents mais savamment accordés qui le composent. La désolation peut-être, plus certainement la mélancolie, frappe de son sceau, de son timbre, dès le morceau d’ouverture, Nyxtellios. Il gîte dans la nuit, et les formes qui le parcourent s’imaginent de manière presque tactile. Davantage peuplés – en ce sens marqués par Empusae sans doute – les morceaux suivants puisent dans un arsenal plus varié, où se croisent les effritements électroniques de résonance insectoïde et surtout les rythmiques presque martiales, du moins solennelles mais sans emphase, alenties pour laisser flotter en forme de bannière une suite de nappes tout aussi cérémonielles appuyant la couleur ocre, le fredon sans joie. C’est parvenue à une telle profondeur que la musique exhale des vapeurs terreuses, un grondement tellurique mêlé de voix comme venues de plus insondables profondeurs. La densité semble alors faire s’effondrer la lumière même.
Oui, nous nous trouvons en une terre esthétiquement chargée, balisée, exempte de no man’s land. Mais, de la même manière que les plus talentueux des peintres académiques du 19e siècle se démarquaient par leur habileté à jouer le plus finement avec les codes imposés, de la même manière Empusae et Onasander composent un parcours sans surprise (que ceux qui aiment se perdre passent leur chemin, ici tout est circonscrit) mais à la profondeur hypnotique.
Denis Boyer