Michael Lightborne – Ring Road Ring (LP)

Gruenrekorder

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Michael Lightborne, artiste britannique, s’intéresse particulièrement aux sons des environnements, comme le montrent ses deux albums, tous deux publiés par le label allemand Gruenrekorder. Le premier, Sounds of the Projection Box, était construit naturellement autour de sons d’un appareil de projection, et celui-ci, Ring Road Ring, résulte d’un travail de récupération et de réinterprétation de sons du périphérique de Coventry, près de Birmingham. Un périphérique qui avait été conçu comme projet de délestage de la ville au profit de la circulation pédestre, et qui connaît aujourd’hui le sort de tous ces dispositifs, concentration de véhicules et dégradation de l’environnement.

Michael Lightborne a capté différents sons aux pieds des piliers du périphérique, cette « ring road », les assemblant de manière presque brute sur la toute première pièce de la première face, pour ensuite utiliser les mêmes sources comme matériau d’un jeu plus poétique. Lightborne affirme avoir ressenti beaucoup de mélancolie dans la collecte de ces sons. Dans un tel contexte, on le croit sans peine, mais la nature concrète et grise de la texture des sons suffit à produire cet effet. Les constructions sonores qui suivent s’étendent donc au croisement d’un chemin souterrain, aveugle, et de la base de l’anneau, parallèlement à la circulation de surface. Toutes les impressions d’obscurité, d’humidité, de passage au tactile, paraissent dans les résonances, dans l’allongement et la répétition de certains sons frappés, travaillés dans la réverbération. D’autres, plus poudreux, finissent d’amalgamer leurs échos en drone, produisant un effet onirique certain. Si la vue s’est perdue dans l’exercice, le toucher et l’imagination la suppléent, on l’entend, mais c’est aussi avec une perception du temps alentie, l’album glissant peu à peu vers une forme de musique ambiante postindustrielle sans aucun vernis tapageur. C’est une constance de l’album, le gris bétonnier reste à dominer le camaïeu, des sons les plus denses, profonds, presque vrombissants, à l’écho de la circulation de surface, avec entre eux le peuple des fausses lumières et des draperies de poudre soufflée. Toile abstraite et poétique, d’un poème sans mot et, étrangeté, presque sans image : dégradé de gris créant sa propre brillance argentée. Toutes les significations de « ring » réunies ici témoignent d’une même agglomération : l’anneau périphérique, la façon dont il « sonne », et le sillon bouclé, « en anneau », qui clôt chaque face.

 Denis Boyer