Y.E.R.M.O. – Collision zone / Y.E.R.M.O. – From gold falls a bad rain

Idiosyncratics Records
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Humpty Dumpty Records
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La musique de Yannick Franck, pour aussi évanescente qu’elle puisse parfois paraître, a toujours semblé plus proche du cuivre que du silicium, de la terre que du plastique, en un mot bien plus organique que synthétique. Celle qu’il pratique en duo avec Xavier Dubois sous le nom de Y.E.R.M.O. n’échappe pas à ce commentaire et, à l’instar de Troum dans un domaine power romantic, Y.E.R.M.O. est un échange d’ondes de cordes, d’effets, de field recordings. Des pièces qui ne s’agencent pas en pavage ni en strates, mais en une solution que toute métaphore rapprochera tôt ou tard de l’alchimie. Sur l’album Collision zone, on assiste à la transformation au cœur même de l’athanor, où rougeoie un bourdon de guitare, déjà noir de sa combustion mais dont émanent tout d’abord de loin en loin quelques réverbérations cristallisées. Qui a déjà observé un foyer au moment où tout n’est plus que braises, a sûrement contemplé ce spectacle, quand le rouge et le noir alternent dans un mouvement de pulsation organique, obsédant, fascinant. De là prend forme et s’élève dans la brume noise un riff de basse, réminiscent de Godflesh, participant à son tour au brouillard métallique. Dans From gold falls a bad rain, un album sorti presque simultanément, l’or est déjà atteint, et l’on pénètre instantanément dans la résonance accordée de la basse et du bourdon. L’une et l’autre s’oxydent, quittant alors la pureté du métal noble, comme l’action corrode la réalité en exécutant le rêve. Au loin, le métal réverbéré s’augmente d’un drone de voix, puis d’une volée tout entière de syllabes dépenaillées, à la façon dont le vent assimile et porte le froufroutement qu’il provoque dans les feuilles. C’est la condensation de l’élément refondu, vaporisé, et il n’en faut pas plus pour entendre toute la musique de Y.E.R.M.O. comme le cycle organisé du bourdon de corde.

Denis Boyer

2010-05-24