Larvae – Loss leader

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Il arrive que la fusion des tempéraments appelle, pour mieux se reconstruire, leur séparation temporaire. C’est ce que la musique de Larvae laisse entendre sur cet album, scindé en deux parties, comme pour figurer, peut-être, les deux faces d’un album vinyle. Nettement dissociées dans le temps, mais aussi dans le style, les deux moitiés explorent en profondeur les motifs alternés ou fusionnés sur l’album Dead weight. Les quatre premiers morceaux de Loss leader forment le Turning around EP et sont composés en tempo ralenti autour de sons de guitares et d’harmoniques divers, accordés à la chaloupe de rythmiques hop nonchalantes. Jolies et mélancoliques, ces compositions ne semblent pas viser la profondeur (c’est bien le seul reproche à leur faire), mais plutôt se laisser porter par la vague et, dans la boucle laisser naître la mélodie douce amère, de ballade pop sans paroles. Encore incrustée d’électronique, l’atmosphère est proche de celle des disques de Keef Baker, voisin de label aussi soucieux de brouiller les pistes. Comme lui, Larvae est capable de constructions électro plus agressives, sur un tempo bien plus tourmenté. En cela, les quatre morceaux de Monster music 2, terminant Loss leader, sont éloquents, n’inaugurant aucune particularité de composition mais jouant, comme les premiers morceaux le font dans leur propre style, l’application à un modèle maîtrisé. Black Lung et Scorn semblent avoir dépêché leurs reflets dans cette déambulation vissée, oxydée et rutilante de flûtes orientales et de pianos en gouttes de pluie. Application de style donc, tout compte fait moins aventureuse que les quatre premiers morceaux, elle est comme eux concentration sur une valeur de densité, de luminosité. Désunies, les deux tendances se montrent comme nues, sans l’artifice que leur procure habituellement l’autre face, ou si peu. Il faut alors reconnaître que l’aventure des cordes présente une plus grande liberté de geste, et c’est peut-être ce bilan que Larvae cherchait à établir en se disséquant ainsi.

Denis Boyer

2009-09-26