Dick Nicolas – Une belle journée

(autoproduction)
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Une belle journée, pour se reposer du tumulte, du bruit et du fracas. Guitariste et chanteur du groupe marseillais Kill The Thrill, Nicolas Dick a isolé ses cordes pour quelques plages, loin de leur rock plombé, formule personnalisée dans le sillage de Killing Joke et Big Black. Une belle journée, c’est l’ode en trois morceaux aux allongements de cordes, tels qu’on pourrait les imaginer sortis de séances communes entre Steve Reich et Troum. Une nuée d’arpèges, les effets désirés, et c’est le départ pour un flot proto-mélodique doucement chaloupé et mélancolique, épaissi par les ajouts de séquences, décorant subtilement la dérive avant que les premiers motifs ne s’évanouissent. Etagement de l’intensité, les couches éclosent parfois comme un rayon de soleil qui surgit de derrière un nuage. Toutefois ce soleil est rasant, adapté à l’atmosphère crépusculaire du paysage. Ses rayons orangés sont d’intenses superpositions d’harmoniques, mais sans violence, ondulant légèrement et tremblant à peine lorsqu’elles touchent les vagues de réverbération. La deuxième pièce, Faer, est plus sombre d’abord, et plus méditative ; les sons traités d’abord en nuage gazeux, privé d’éclairage, comme sous éclipse. Il faut dire que leur modulation n’a pas l’éventail de la corde : le morceau n’est tissé que de voix, fredonnée, chantée, bourdonnée. Elle s’élève et, triste après avoir été sombre, s’affranchit de la médiation métaphorique que subit la corde pour prendre rapidement l’allure d’une incantation. D’où, vers quoi, il ne s’agit pas d’imaginer un quelconque rite, mais bien d’observer et d’épouser un mouvement aérien planant vers la lumière. La voix, sous toutes ses formes et ses traitements y est texture pure, instrument à vent ondoyant, se déployant jusqu’à bloquer l’instant. Le morceau titre qui clôt l’album Une belle journée s’inscrit plus encore dans le passage du minimalisme répétitif, les cordes plus nombreuses y sont bouclées, créant mille anneaux lumineux dans un ciel toujours saisi au couchant. La basse, en notes éparses, balise le paysage comme pour le rapporter à un panorama plus vaste, qui englobe cette fois la mer et le ciel, dans lequel l’élément humain retrouve sa place de droit. L’émotion qui en naît est aussi plus mélodique et ce n’est peut-être pas involontaire. Et si cette fois la voix est absente, en jurerait l’entendre planer sur le train de notes au loin, né de la boucle.

Denis Boyer

2009-09-24