Absent – Children

Guerilla Underground
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Il est plaisant de retrouver le duo Absent à la fois si fidèlement ancré dans son style d’élection et maintenant si habile à le faire naviguer en de subtiles figures. Une bonne partie des épigones de l’electronica s’est évaporée et la suite d’Autechre n’est plus si populeuse. Il est alors temps de regarder les plus persévérants et d’entendre comment ils parlent désormais ce langage. Cette électronique parcourue de rythmiques brisées, de sons vissés et de nappes minimalistes peut s’étendre de l’abstrait au figuratif, mais aussi de l’accidenté au méditatif, sans que ces paires d’extrêmes ne coïncident obligatoirement. Les membres d’Absent ont gardé la pratique du grésillement mis en rythme, du son d’orgue joué en triplette de notes mélancoliques, les percussions à ressort, ils en ont maîtrisé l’alphabet risqué tant sa syntaxe recèle de pièges. Ils les évitent en des compositions patientes, froides et belles comme une aube, oui on les dirait réverbérations électroniques de la cold wave. Les réminiscences d’une électro dark ne sont pas étrangères à l’éveil de cette impression, et l’on entend comme des échos de Delta Files ou Elektroplasma. Mais cela ne suffit pas à emmener le disque sur le terrain de l’électro-industrielle, même sur les quatre remixes (par Kabutogani, La Division Mentale, Ten Data Keshin, Shikuza) constituant la deuxième moitié du disque : ils ne retirent rien à cette harmonie attristée, ils ne la brusquent pas même s’ils la font plus puissante, l’épaississent ou la nimbent d’une note haute et ouatée. Et c’est toujours dans l’intimité d’une boîte à musique que se retranchent les compositions, qui en certains passages évoquent des rencontres de mélodies électroniques minimalistes du milieu des années 80 (on pourrait y voir un défaut). Mais le principal est une fois encore la qualité de cette évocation qui sourd goutte à goutte comme sur le quatrième morceau, Processus primaires, piano sur grouillement lointains de cordes qui rappellent dans leur glissement autant de billes roulant doucement et se choquant sur un parquet. Piano, basse pour l’emmener plus haut, et le voyage intérieur reprend, au plus profond.

Denis Boyer

2009-02-22