Delplanque Mathias – L’inondation / Delplanque Mathias – La plinthe

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Tout comme le peintre sait combien il est difficile de figurer le mouvement par l’immobile, certains musiciens minimalistes savent combien il est difficile de jouer l’immobilité avec ce qu’on ne peut arrêter. C’est peut-être ce point qui fera comprendre un jour la musique par un plus grand nombre comme un art de l’image. Arrêter le court du son, son déroulement ontologique dans l’espace et dans le temps, nul n’y est tenu, car nul n’est tenu à l’impossible. Mais l’artiste est souvent un tricheur, qui tente de donner le change. Mathias Delplanque, qui sait distribuer les brillances en musique (Lena), a aussi sa face obscure, ses replis ténébreux. Au plus profond de certains d’entre eux, il tente la prouesse que nous avons décrite. Dans L’inondation par exemple (comme naguère dans la formation Missing Ensemble), il plonge dans un goudron filandreux, une nuit de souffle brumeux et de cliquetis rouillés. Une pulsation rare, peut-être marquant la corrosion, le poinçonne plus qu’elle ne le rythme. Car le temps n’a plus le jour avec lui pour marquer l’alternance. Seule la nuit règne ici. On devine les formes qu’elle caparaçonne, on se fie à leur bruit avant tout et ce n’est que juste dans cette sphère souterraine. Atelier soumis à la rotation, le disque est le lent balancier de sa propre période. Il suinte comme les caves humides et c’est peut-être finalement le seul signe qui le fait échapper à sa parfaite immobilité. Tout aussi beau mais plus lumineux, La plinthe est un autre disque de recoin, mais il y a des recoins encombrés. Ceux-ci fourmillent de vie, et le temps est alors réévalué : crépitements denses en chute rare, attaques de basse, tintement de gong en éclosion lointaine, souffle de pression et humidité des conduits – ces signes de vie et de lumière n’effacent pas la nuit, ils la nourrissent. Elle abandonne son absolu pour abriter un firmament. La vraie nuit n’est pas moins hospitalière. Le temps retrouve son cours, jusqu’au son de déroulement de ce qui ressemble à un appareil de projection sur la plage 3. Alors La plinthe se découvre vite en magnifique et subtile œuvre dark ambient, où les points lumineux s’agrègent en nappe miroitante, transformant la plinthe en une autre base, un passage vers un autre socle, plus fluctuant, mer ou voie lactée.

D.B.

2008-09-15