Ielasi Giuseppe – August

12k / Metamkine
www.12k.com

G. Ielasi n’a réalisé que quatre albums mais ils sont assez riches en détours et en texture pour donner à réfléchir la grande profondeur de son travail. August est un disque en apparence plus linéaire que le précédent, publié par Häpna en 2006, dont la grosseur du grain le plaçait en forme et en fond au carrefour bien fréquenté des musiques concrètes et bourdonnantes. Un carrefour presque identique, comme placé sur un autre plan, parallèle et plus éclairé, est traversé dans August. La guitare comme source, mais aussi l’orgue Hammond, le piano, des ondes radio, des synthétiseurs, et d’autres sons d’origine obscure, constituent le petit orchestre de Ielasi, que Steve Roden et Stephan Mathieu ne renieraient pas. Très vite, la mélancolie de l’automne approchant s’impose à l’album, teinté d’éclaircies dans un ciel nuageux. Le motif d’orgue à trois notes (évoquant puissamment le morceau Untitled de The Cure) courant sur l’ensemble du deuxième morceau est emblématique de cette exploration du sacré de l’intime, du déploiement romantique de l’insuffisance intérieure sur un paysage grandiose (quelle que soit sa dimension), approchant le sublime. Les brouillages de fréquences gainant ces filins et ces plages d’harmoniques montrent à leur tour une matière rassemblant intérieur et extérieur, d’avant la taille, une matière brute de la tristesse. Les juxtapositions de grains (crépitement et glitch, contre fuselage de corde et souffle d’orgue) vont ainsi naturellement jusqu’à la fusion, qui rêve à l’immobilité temporelle – elle tient ici de la contemplation alors qu’elle était issue de la répétition de motifs rythmiques quasi dub sur l’album sans titre publié par Häpna. August est la belle préparation à la fuite des forces, à l’endormissement des réserves, au roussissement des extrémités ; le vent qui bruisse dans cette élégie que l’on croirait jouée au cor anglais dans le troisième morceau emmène avec lui le soleil, accommode au froid, à la lumière atténuée, à l’âge qui coule insensiblement. D.B.

D.B.