Simon Whetham – What Matters is that It Matters

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Baskaru

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Qu’il infiltre une rivière du Limousin enregistrée par Cédric Peyronnet / Toy Bizarre, qu’il métabolise les field recordings de Slavek Kwi / Artificial Memory Trace, ou qu’il compose seul, Simon Whetham tend ses filets à la juste frontière séparant le réel de l’imaginaire. Mais si le plus souvent ce changement de dimension s’opère depuis un lieu géographique défini jusqu’à son interprétation au pinceau musical, cet album, le premier pour le label Baskaru, est autonome, empreint certainement de mille traces de lieux, mais exempt de toute signalisation. Tel qui rapporte de ses voyages un sac de menus souvenirs, qu’il aura négligé de cloisonner, ou mieux : qu’il aura pris soin de mélanger, pariant sur l’ordonnance naturelle que le coup du sort aura prodiguée au désordre, pourra s’enorgueillir d’avoir créé en propre l’image d’un nouveau territoire. De toute évidence, rien ne vaut une vague, un mouvement de mer dont la laisse se laissera arpenter après son retrait, pour ouvrir une telle œuvre. C’est ainsi que débute l’album What Matters is that It Matters, ou du moins le semble-t-il : flux et reflux, lumière de fanal et mirage de corne de brume. La laisse maintenant, on y trouvera tant la coquille marine que le grillon ; de la première, portée à l’oreille, le tintement métallique sourd pour devenir battement accordé au mouvement tidal ; du second, la dissolution en grains de sable tapissant ce que le métal devient peu à peu, une conque résonnante. L’abrasion et le lisse ne cesseront de se concéder un voisinage tout au long de l’album, c’est même de leur union que naîtront les plus élégants coups de vent, portant, après le grain, l’épiphanie lumineuse comme un chant céleste. La brillance métallique habille celui-là aussi, qui parfois cohabite avec le rugissement des plaques ou l’érosion des dunes. C’est une musique qui porte loin, si loin au fond de soi qu’un cadre se dessine alors, le chambranle d’une fenêtre, et le lointain tamisé par la vitre devient spectacle pour l’intime, s’y déverse et l’intègre, s’ajoute à la matière du souvenir.

 Denis Boyer