Fovea Hex – The Salt Garden I

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Headphone Dust / Die Stadt

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Cinq années séparent The Salt Garden, nouvel E.P. de Fovea Hex, de l’album Here Is Where We Used to Sing. Cinq ans pour découvrir ce nouveau gisement de gemmes que recèle chacun des morceaux du groupe constitué autour de Clodagh Simonds. Des gemmes, ces chansons n’ont pas que la rareté, elles exercent encore leur fascination par le tremblement de leur feu, l’eau fragile de leurs facettes. Il a toujours existé dans cette musique, depuis la trilogie Neither Speak nor Remain Silent et jusque sur l’album, un point de vibration qui prononce la fin ou le début de la fragilité. Des plus éthérés et expérimentaux de ses travaux dans Fovea Hex, à savoir ceux de la première trilogie, Clodagh Simonds a gardé ici la respiration absorbée par la lumière. De ses compositions plus lyriques de l’album Here Is…, elle fait encore miroiter l’horizon des vallons verdoyants rasés par la lumière des crépuscules. Secrets intimes ou révélations de la formule du monde, les chansons de Fovea Hex soulèvent une douce et grave épiphanie (« Almost always/She will appear by nightfall/In the near dark/And the farness gives way » – paroles extraites du morceau The Undone Mother). Dans The Salt Garden ce sont autant de cristallisations discrètes, de croissances de gemmes : jardin de sel, microcosme florescent. De même que l’arbre en laissant ses feuilles génère l’humus où, le moment venu, ses fruits tomberont en promesse de régénération, de même en ce riche terreau de drone se préparent les mouvements qui se résoudront lors d’un printemps sonore, en nouveau feuillage et superbe ramure. Ici, l’arborescence est saline.

Le dénuement de forme est de ceux que l’on pratique à rebours, après avoir tant éprouvé sa technique que la plus belle des réussites est la mise à nu. La voix de Clodagh Simonds, si justement appariée à l’harmonium jusque dans la fin de ses réverbérations, lève en paroles – mais ce pourrait être aussi bien le chant du vent, de l’eau, de la terre – des chansons qui semblent sans âge, comme issues de la lande.

Qu’elles soient domestiques ou pastorales, ces chansons possèdent la force des éléments (on pense aux Murder Ballads de Martyn Bates et Mick Harris) à tel point qu’elles paraissent générer la musique qui tantôt la suit en traîne, tantôt l’enveloppe, violon et d’autres cordes, harmonium, piano, textures alchimiques… jusqu’à habiter seule le dernier morceau, Solace, entièrement instrumental, où Cora Venus Lunny et Laura Sheeran, ou encore Kate Ellis, Brian Eno (enthousiaste dès la première heure) et le violoniste baroque Justin Grounds retrouvent Clodagh Simonds et Michael Begg (Human Greed), co-compositeur à demeure.

The Salt Garden I est le premier EP d’une nouvelle trilogie. Il inaugure dans le même temps ce que je n’ai pas peur d’appeler un renouveau recommencé : il en est ainsi de chaque nouveau jour.

Denis Boyer